Désir féminin, plaisir et libido, entre secrets et malentendus
Des chercheurs du monde entier tentent de percer le secret de la libido dont les commandes se logent dans le cerveau. Car pour les couples de longue date, le feu de la passion finit souvent par s’éteindre. S'agit-il d'une évolution inéluctable, d'un problème d’ordre pathologique ou plus simplement, d'une mauvaise compréhension des mécanismes du désir féminin ?

Nous vivons dans une société où nous devons nous justifier de ne pas avoir de désir sexuel et c’est particulièrement vrai pour les femmes.
L’industrie pharmaceutique a mis au point un médicament capable de doper la libido féminine avec à la clé, de juteux profits : le viagra pour femme. Depuis toujours, les femmes passent pour des êtres sans désir, un mythe battu en brèche par des découvertes scientifiques récentes. En effet, le désir féminin met en jeu beaucoup plus d’éléments que la science a bien voulu le croire jusqu’à présent, comme le fait que les femmes ont une libido aussi importante que les hommes mais que celle-ci s’exprime différemment. Notre vie est guidée par la satisfaction de besoins primaires ; manger, boire, dormir, aimer, être aimé, avoir des relations sexuelles, se reproduire, autant de besoins physiologiques que partagent les deux sexes, mais leur désir sexuel en revanche, prend des voies différentes.
L’impact de l’environnement sur le désir féminin.
Les femmes, dit-on, sont en quête d’une relation stable alors que les hommes seraient moins enclins à la monogamie. A l’institut de sexologie de l’université de Kiel en Allemagne, on a étudié le désir féminin à l’aide d’un ordinateur et d’une sonde vaginale introduite dans le premier tiers du vagin. L’étude consistait en la présentation d’images sexuelles pendant que la sonde enregistrait les changements de couleur induits par des pulsations vaginales dont la transmission permettait de calculer l’excitation génitale subjective.
L’expérience devait déterminer l’influence de l’environnement sur le désir et l’excitation des femmes. La volontaire devait évaluer des images à connotation sexuelle associées à des scènes du quotidien en indiquant son degré subjectif d’excitation ressentie. Au démarrage d’une nouvelle série, défilaient des « images de contrôle », une dizaine de photos représentant la nature ou des scènes du quotidien qui apparaissaient toutes les secondes pour passer ensuite aux stimuli sexuels. Pendant ce temps, la jeune femme avait pour tâche d’évaluer l’excitation sexuelle ressentie sur une échelle proposée sur l’ordinateur sous la forme d’un curseur. L’apparition d’images de comparaison était aléatoire, mais l’on a remarqué que lorsque défilait une série d’images représentant des bras avec une peau saine suivie d’une image érotique, la réaction sexuelle de la jeune femme était élevée. À contrario, après avoir visionné des images repoussantes d’affection de la peau, le curseur de sa réaction sexuelle était au plus bas. Cette expérience visait à déterminer l’affluence des zones cérébrales sexuellement inhibitrices sur la réaction sexuelle. Elle révéla que le désir ressenti par les femmes dépendait fortement du contexte et qu’il était nettement plus fragile que son pendant masculin, mais qu’une fois libéré, il se révélait être d’une grande puissance.
Selon les données médicales, 4 femmes sur 10 souffriraient d’un trouble du désir.
Certains hommes seraient sans doute soulagés d’apprendre que derrière le désintérêt érotique de leur partenaire se cache une pathologie avérée et que leurs compétences d’amants ne sont pas en cause. Pourtant, on sait aujourd’hui que 95% des femmes sont en mesure de parvenir seules à un orgasme. Autrement dit, avec la masturbation, il n’y a pas de troubles du désir ou du plaisir, tout fonctionne très bien. Pourquoi n’ont-elles aucun problème à atteindre un orgasme seules, alors qu’avec un partenaire masculin c’est plus difficile ? La réponse se trouve dans le manque de motivation du partenaire masculin qui est en grande partie responsable du trouble de la femme.
Il y a une vingtaine d’années, l’industrie pharmaceutique a financé une vaste campagne afin que l’absence de désir féminin soit reconnue comme une maladie. C’est ainsi que fut proclamé un peu partout et écrit dans des revues spécialisées que 41% des femmes aux États Unis souffraient d’une dysfonction sexuelle féminine. La médecine avait alors tout intérêt à estampiller la femme comme un être sans désir, voire frigide, si elle voulait ensuite lui vendre son remède miracle. Et le prétendu miracle vint des Pays-Bas, mis au point par un biochimiste néerlandais docteur en psychopharmacie, Adriaan tuiten, qui associa la testostérone à un second principe actif, le sildénafil (Viagra®) agissant directement sur le cerveau de la femme. Pour mener à bien ses travaux, le biochimiste a divisé 200 femmes censées souffrir d’un trouble du désir en deux groupes. Le premier était constitué de femmes dont le cerveau ne traduisait pas les stimuli érotiques en excitation sexuelle. Pour elles, le chercheur a mis au point une pilule baptisée « Lybrido ». Quant au second groupe, il était composé de femmes qui réagissaient à ces stimuli, mais dont le cerveau stoppait brusquement l’excitation à un moment donné, par exemple en raison d’expériences sexuelles passées négatives. Pour ces femmes, le Néerlandais a mis au point « Lybridos », une pilule agissant directement sur le cerveau en levant les blocages et boostant par conséquent l’excitation sexuelle.
Mais le médicament ne fit pas l’unanimité parmi la communauté scientifique. Pour Helen Fisher, anthropologue et chercheuse en comportement humain, si l’on prend en compte le fait que la sexualité féminine est déterminée par des facteurs contextuels, le viagra féminin ne peut pas être d’un grand recours. « Il faudra toujours à une femme les chandelles, les mots doux, le dîner romantique et les bas en soie. Bref, le contexte. Et ça, seul un partenaire peut le donner. »
Le manque de désir n’est pas une maladie en soi, mais la conséquence d’une absence de communication dans le couple.
Face à une libido en berne, beaucoup de couples pensent qu’ils se connaissent depuis trop longtemps, que l’attrait de l’exotique, de l’inconnu, de la nouveauté a disparu. Mais le désir ne s’use pas, le problème n’est pas de se connaître trop bien, d’être trop proche, car la complicité d’un couple se construit sur la connaissance de l’autre, de ses besoins, de ses envies et fantasmes. Le problème est que nous n’apprenons pas à gérer nos relations. Et gérer une relation, cela signifie communiquer. Or, personne ne nous apprend cela, aucune éducation à la sexualité ne nous y prépare.
Un exercice qui a fait ses preuves pour rapprocher les couples qui se sont éloignés, consiste à convenir d’un moment à deux, l’objectif étant de retrouver une proximité physique. Nu, peau à peau l’un contre l’autre sans parler. Il s’agit dans un premier temps non pas de susciter une stimulation, une excitation ou un orgasme mais simplement de reprendre contact avec l’autre. Car on sait qu’un contact physique en appelle un autre, et qu’avec le toucher, on en veut toujours plus.
Le désir féminin est beaucoup plus fragile que le désir masculin.
Chez l’homme, une fois le désir en marche, tout se concentre sur lui tandis que chez la femme, il peut facilement s'évanouir à cause d’un élément perturbateur minime. D’une manière générale, la femme a besoin d’avoir une bonne estime d'elle-même, son image corporelle est également importante et elle doit sentir le désir dans le regard de son partenaire. Le désir féminin reste difficile à cerner pour bien des hommes. Que veut dire une femme lorsqu’elle prétexte une migraine ou dit ne pas avoir envie ? Pourquoi la passion des premiers mois finit-elle par disparaître ? L’ennui au lit n’est pas qu’une affaire de femmes mais ce sont elles qui le plus souvent, pointent le problème du doigt. Ce sont les femmes qui se plaignent, ce sont elles les gardiennes de la relation, qui assurent son suivi.
Au bout de plusieurs années, la plupart des couples ne fonctionnent plus aussi bien. Au début, la relation sexuelle bénéficie de l’attrait de l’inconnu, du secret, de la magie de la nouveauté. On éprouve une attirance dont on ignore l’origine et que l’on ne veut d’ailleurs pas connaître. La relation est pulsionnelle, archaïque, originelle. Mais cet état ne peut perdurer indéfiniment. Nous vivons une époque de mutation, les vieux modèles ont fait leur temps. Nourrir la famille n’est plus le seul apanage des hommes. Les femmes pourraient laisser libre court à leur désir mais leur ressenti sexuel est toujours assujetti à des règles sociales ainsi qu’à un carcan moral. Si la culture s’est toujours efforcée de réprimer la sexualité féminine, c’est parce que celle-ci est particulièrement débordante, exubérante et peut-être aussi dévorante. Mais notre culture ne permet pas aux femmes de vivre pleinement cet état biologique dont la nature les a dotées.
Ce que nous pensons, ce que nous nous autorisons et efforçons de penser de la sexualité a un effet sur notre cerveau sexuel qui va lier nos pulsions, nos émotions, nos réflexions, le rendant ainsi plus ou moins puissant.
Au fil des siècles, les normes socio-culturelles ont imposé une image de la femme décente et chaste. Ce mythe du sexe vertueux vient appuyer l’idéal romantique de l’amour monogame, profondément ancré dans notre société. Le désir féminin a été jusqu’à présent majoritairement défini depuis le point de vue masculin. Cependant, de nouvelles voix se font entendre chez les chercheurs pour qui le désir des femmes serait une force sous-estimée et réprimée.
Daniel Burgner est un auteur newyorkais et journaliste du New York Time. Dans un ouvrage qui a fait débat, Die versteckte Lust der Frauen (La luxure cachée des femmes), il expose les derniers travaux de recherche des sexologues concernant le désir féminin. Thèse centrale de son livre, les femmes ne sont nullement les gardiennes de la fidélité. Une étude en particulier, suivant la trajectoire du désir de près d’un millier de couples de longue date révèle que le désir masculin décline comme l’on s’y attend, mais graduellement. Le désir féminin en revanche chute significativement après quelques années. Ces recherches bousculent nos idées reçues puisqu’on s’aperçoit que les femmes ne sont pas des créatures monogames, programmées génétiquement pour être fidèles. Pour son livre, Daniel Burgner a interviewé des scientifiques, des chercheurs et des centaines de femmes. Ce sont elles qui dans un couple, s’ennuient souvent le plus vite.
Dans une relation à long terme, le désir décline nettement plus rapidement chez les femmes que chez leur partenaire masculin, un secret bien gardé et une vérité dérangeante qu’on préfère passer sous silence.
Pour Daniel Burgner, nous entretenons une sorte de schizophrénie vis-à-vis du désir, et en particulier celui des femmes. On en fait partout étalage mais en même temps, on ne veut pas y regarder de trop près. Dans son ouvrage, Burgner expose des travaux de primatologie car les singes peuvent nous éclairer sur le désir humain. Kim Wallen est spécialiste en neuro-endocrinologie à l’université Emory d’Atlanta aux États-Unis. Il a étudié la parade nuptiale chez les macaques rhésus et ses découvertes ont de quoi étonner. Chez ces singes, ce sont les femelles qui contrôlent les interactions sexuelles et initient l’accouplement. Les mâles eux, se contentent de répondre à leurs sollicitations. La plupart du temps, les femelles ne leur prêtent pas attention, mais lorsque l’une d’elles s’intéressent à un mâle, elle s’approche de lui et s’assoit à ses côtés. L’interaction est très intense, comme si le mâle devenait tout à coup le centre de son attention. Des femelles qui courtisent les mâles et prennent les choses en mains, voilà de quoi écorner le mythe du sexe faible et passif.
L’intérêt des femelles persiste environ trois années avant de décliner de façon significative. Kim Wallen est persuadé que la libido des femmes suit un modèle identique. Le fait est qu’un nouveau partenaire sexuel est beaucoup plus excitant qu’un partenaire de longue date, une question récurrente chez les humains : comment entretenir la flamme du désir, préserver l’intensité des débuts ? Le chercheur pense que l’installation d’une routine avec le partenaire sexuel vaut tout autant pour le macaque rhésus que pour les humains.
Pourquoi le désir masculin reste-t-il relativement stable alors que celui de la femme perd en intensité ? L’explication est à chercher du côté de l’anthropologie.
Nous avons hérité de la stratégie de reproduction léguée par nos lointains ancêtres. Les hommes cherchent à diffuser au maximum leur ADN tandis que les femmes visent la diversité génétique. D’après Helen Fisher, nous avons été conçus il y a des millions d’années pour la monogamie sérielle, une succession de relations à long terme. Aujourd’hui, l’espérance de vie a rallongé, les femmes sont indépendantes financièrement et peuvent se permettre de retenter leur chance quand leur mariage ne les satisfait plus. Ce faisant, nous renouons avec un modèle vieux de plusieurs millions d’années. Ulrich Clement quant à lui, pointe une forme d’antagonisme entre deux aspirations : « D’un côté, nous recherchons l’attachement, la fiabilité, la sécurité, un ancrage émotionnel, un lien d’appartenance. C’est un désir fort et profond. D’un autre côté, il y a un souhait de « vitalité », sentir sa corporalité, sentir qu’on est vivant. Or, tout ça n’est pas toujours compatible. Tout l’art consiste à concilier ces deux points. » Nous sommes pris entre deux forces. Le désir, qui est un cocktail chimique à base de dopamine, de sérotonine et d’adrénaline qui distille une bonne humeur enivrante, fait oublier douleur, fatigue et soucis et rend heureux sans raison. Et le désir d’attachement, de sécurité et de ne faire qu’un avec un seul et unique partenaire.
Avec les années, la fascination du début cède la place à une intimité familière. Le sexe se teinte d’ennui, une situation plus souvent invoquée par les hommes pour justifier leurs incartades.
L’infidélité est un phénomène très répandu, partout à travers le monde. Une étude américaine a demandé à des conjoints infidèles s’ils étaient heureux dans leur mariage. 54% des hommes et 36% des femmes ont répondu oui. Mariés depuis de nombreuses années, ils étaient heureux, souhaitaient rester mariés, mais allaient quand même voir ailleurs. Un peu comme si les trois systèmes cérébraux que sont l’attachement, l’amour romantique et la libido n’étaient pas toujours bien connectés.
Ditrich klusman, spécialiste en psychologie évolutionniste a interrogé près de 2000 étudiants. Bilan : plus la relation est longue et plus l’intérêt sexuel de l’homme et celui de la femme divergent. Au début de la relation, hommes et femmes veulent des relations sexuelles fréquentes. Trois ans plus tard, cela ne concerne plus qu’un quart des femmes sondées tandis que leur désir d’aller voir ailleurs augmente. Pour le chercheur, cette dynamique ne pourrait pas exister s’il n’y avait pas pour les femmes engagées dans une relation stable, un avantage à avoir des rapports sexuels avec d’autres hommes. Cet avantage, comme toujours dans l’histoire de l’évolution, est lié à la reproduction, en l’occurrence, une augmentation de la diversité génétique de la descendance. Pour cette raison, les femmes sont tout autant disposées à la fidélité qu’à l’infidélité, les deux allant de pair. En conséquence, il est tout à fait possible que la diversité génétique dont nous avons besoin pour perpétuer l’espèce ne soit pas le fait de l’infidélité des hommes, mais de celle des femmes. Les hommes ont besoin de penser que les femmes ne sont pas infidèles et les femmes veulent que les hommes pensent qu’elles ne le sont pas. Hommes et femmes ont donc décidé lequel des deux sexes était volage et lequel des deux ne l’était pas.
Le cycle menstruel de la femme aussi a une influence sur ses préférences du moment.
Si d’ordinaire elle préfère son partenaire aimant, les jours fertiles, elle est attirée par des hommes présentant une virilité marquée, promesse d’un patrimoine génétique de qualité. En période d’ovulation, les femmes ont un goût très différent pour les hommes dont elles apprécient le genre « macho ». Des femmes intelligentes, cultivées qui en temps normal enverraient promener ce genre d’hommes, les considèrent au moment de l’ovulation comme des partenaires sexuels de choix avec qui elles peuvent faire du « shopping génétique ». Pendant l’ovulation qui est la phase de fécondité, elles ont une préférence pour les hommes bourrés de testostérone, au menton prononcé et la mâchoire carrée. Le reste du temps, elles préfèrent les hommes plus doux.
Jusque dans les années 1990, le désir de la femme ne faisait l’objet que de rares études. Mais désormais, la libido féminine intéresse de plus en plus l’industrie pharmaceutique. Les médicaments censés booster l’excitation ouvrent en effet de nouveaux marchés et font miroiter des perspectives de profits juteux. Mais la matrice du désir féminin ne se laisse pas décoder facilement car contrairement aux hommes, chez les femmes tous les stimuli ne se traduisent pas dans le cerveau en excitation sexuelle. C’est ce qu’a démontré un reportage analysé par Mariam Pieper, professeur de sociologie.
À l’occasion d’une fête entre amies, huit jeunes femmes se sont trouvées en présence d’un strip-teaseur venu s’effeuiller au cours d’une chorégraphie précise. La sociologue a décrypté les réactions des jeunes femmes qui se sont portées volontaires pour l’expérience. Une gestuelle fréquente revient souvent, la main devant la bouche qui dissimule un rire et qui donne à penser que les jeunes femmes ne prennent pas la situation très au sérieux, mais aussi qu’elle leur paraît un peu inquiétante, étrange, qu’elle leur est également étrangère. L’explication est sans doute que les circonstances remettent en question les attentes normatives de la société. Généralement, ce sont les femmes qui attendent passivement, ce sont elles aussi qui proposent ce genre de prestations, en conséquence de quoi cette transgression des attentes normatives, plutôt que susciter l’excitation, produit de l’insécurité. Lors du strip-tease, une sorte de contact s’établit, un contact visuel et même tactile. Mais passé un certain point, il semble que les jeunes femmes ne veuillent plus s’impliquer. À ce stade, on a l’impression que pour elles, la situation n’a plus rien d’érotique ou d’amusant mais suscite au contraire une réaction de défense du fait de la trop grande proximité, ce que confirment les propos des jeunes femmes : « la sexualité ou l’érotisme devraient toujours rester subtiles et non pas mis en scène, ce que je trouve artificiel. Cela n’a plus rien d’émouvant. » ; « Je n’arrivais pas à me concentrer sur son corps parce que j’étais mal à l’aise du fait que tout le monde me regardait. Pendant tout le temps où il se déshabillait, il essayait de maintenir le contact visuel, ce qui était assez désagréable. » ; « Moi j’ai trouvé ça très amusant, mais pas du tout érotique, sexy ou attirant, pas du tout ! »
En revanche, dans le même contexte vécu par des hommes, le désir et l’excitation semblent y jouer un rôle important. Les hommes sont visiblement fascinés, le contact physique ne suscite pas chez eux une réaction de peur. Comment expliquer qu’en public, hommes et femmes réagissent différemment face à un strip-tease ? Une fois encore, cela s’explique par la façon dont la société codifie les rapports entre les sexes. Les hommes sont habitués à ce que les femmes soient ou puissent être des objets sexuels « consommables ». Mais à l’instar de l’exemple précédent, lorsque la situation s’inverse, cela provoque une confusion, une certaine forme d’insécurité comportementale. Les jeunes femmes ne savent pas comment se comporter car la situation ne correspond pas au modèle classique, aux attentes normatives de la société puisque pour une fois, c’est l’homme qui est un objet sexuel. Aujourd’hui encore, les femmes ne sont pas prêtes à se débarrasser de leur carcan culturel. Même si elles réussissent professionnellement, ne sont plus dépendantes des hommes, sont cultivées etc. leur émancipation ne remonte qu’à une ou deux générations. Or, il n’est pas possible d’effacer une culture de plusieurs milliers d’années en l’espace d’aussi peu de temps.
Pour certains, désir et amour sont indissociables. D’autres en revanche arrivent à dissocier sexe et sentiments.
Au centre hospitalier universitaire de Genève, on mesure par IRM l’activité cérébrale de volontaires alors qu’on leur montre des images érotiques. Cette expérience est conduite par un sexologue, Franscesco Bianchi-Demicheli. À partir des processus biochimiques du cerveau, il est parvenu à établir une sorte de carte du désir et de l’excitation. Il a ainsi pu prouver que la genèse du désir dépend d’une multitude de facteurs. « Souvent, on pense que le désir sexuel, la libido est quelque chose de très animal. Une pensée populaire erronée car il s’agit en réalité de l’une des fonctions les plus complexes du cerveau, véritable cher d’orchestre de tout le phénomène lié à l’excitation et le désir. Le cerveau est ainsi l’organe sexuel par excellence. » Le désir sexuel n’est donc pas le fruit d’une pulsion animale mais il est piloté par des structures cérébrales extrêmement complexes.
On a découvert que dans le désir sexuel sont impliquées des structures liées aux émotions, la mémoire, la motivation, la récompense et son anticipation, des fonctions cognitives parmi les plus complexes. Comme le cerveau pilote l’excitation, le ressenti du désir chez les femmes ne dépend pas seulement des stimuli sexuels extérieurs, mais d’un ensemble complexe de facteurs. Le sexologue a d’ailleurs découvert que ces stimuli ne sont pas nécessaires pour provoquer le désir, qui peut émerger par une simple pensée de l’être aimé.
En conclusion, il est temps de revoir l’image de la femme qui ne mobiliserait sa sexualité que pour trouver un homme pour la vie et perdrait ensuite sa libido. Les femmes sont tout autant désirantes que les hommes, ce sont leurs modes d’expression qui diffèrent. Elle ne sont pas plus programmées pour la fidélité que pour l’infidélité. Mais carcans culturels obligent, elles ne s’autorisent pas toujours à écouter leurs désirs.
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