BDSM : Antécédents d'abus sexuels et bdsm.
Prévention BDSM - Peu de pratiquants BDSM se prêtent au jeu de de l'auto-analyse, du moins pas publiquement. Lors de nos recherches sur certains sites BDSM, nous avons observé que, sous couvert d'ouverture d'esprit (de transgression), aucune pratique, si violente ou dégradante soit-elle, ne faisait l'objet d'une réflexion particulière quant à ses fondements psychologiques.

"Toutes tendances perverses plongent par leurs racines dans l'enfance." Sigmund Freud ; Introduction à la psychanalyse, XX (1917)
Pour Freud , le sadomasochisme est une pratique déviante, une « tendance perverse ». Ses travaux sur la tendance sadomasochiste de ses patients (tous suicidaires à une seule exception près), sont encore aujourd'hui une référence majeure pour les analystes modernes, bien que les avis sur la question soient désormais plus nuancés. Dans sa troisième édition, le DSM (Diagnostic and Statiscal Manual of Mental Disorders ) définissait le sadomasochisme non plus comme une déviance sexuelle, terme devenu péjoratif, mais comme une forme de paraphilie (DSM-III; APA, 1980). Quoi qu'il en soit, si la lettre semble vouloir s'atténuer, l'esprit nous parle toujours d'un dysfonctionnement, d'un « mental disorder ». Toutefois, certains psychiatres comme Paul-Claude Racamier, ont observé dans le masochisme un rôle contre-dépressif, et la psychanalyste Evelyne Kestimberg lui reconnaît quant à elle un rôle dans la guérison de certaines psychoses. Le BDSM est une forme d'expression de l'érotisme caractérisée par la recherche du plaisir dans la douleur, l'asservissement, l'humiliation, la soumission, ce qui du point de vue de la psychanalyse relève d'un désordre de l'économie psycho-sexuelle.
Dans la communauté BDSM, une certaine forme de déni entoure la question des paraphilies auxquelles s'adonnent ses membres, dominants/dominas ou soumis/soumises.
Certains le reconnaissent : « Nous sommes très nombreux à être dans le déni, à dire j'aime ça, parce que j'aime ça, sans vouloir trop chercher les causes, de peur de trouver des choses forcément dérangeantes. Car causes il y a et elles sont pour la plupart bien enfouies dans notre subconscient. Exemple : les femmes qui ne "se souviennent pas" avoir été violées. Jusqu'au jour où leur agresseur se fait arrêter et là tout leur remonte en pleine figure. »
Alexandre Gamberra, un universitaire français enseignant les avant-gardes du XXe siècle, la littérature contemporaine et la littérature noire francophone, également spécialiste des représentations littéraires et artistiques du corps et des sexualités, pratique le SM et déclare : « Cette déviation sexuelle - ce terme n'est pas, sous ma plume, péjoratif : j'en use pour circonscrire la nécessité de certain(e)s d'entre nous de théâtraliser la sexualité et de la jouer, par le truchement d'objets détournés par le désir de leur destination habituelle - touche des individus qui, lors de leur structuration psychique, ont été particulièrement blessés. Attention, je ne soutiens pas que nous avons tous(tes) été traumatisé(e)s, violé(e)s, battu(e)s, incesté(e)s dans l'enfance ! Je pense simplement que la lutte au terme de laquelle nous avons fini par nous construire a été si rude que nous en conservons des souffrances que nous exorcisons dans le secret de l'alcôve. »
Exorciser, apaiser, guérir. Encore faut-il savoir ce qui doit l'être.
Peu d’adeptes du BDSM se prêtent au jeu de l'auto-analyse, du moins pas publiquement. Si on analyse les interactions des membres de certains sites dédiés, on observe que sous couvert d'ouverture d'esprit (de transgression), aucune pratique, si violente ou dégradante soit-elle, ne fait l'objet d'une réflexion particulière quant à ses fondements psychologiques, du point de vue du spectateur comme de l’acteur. Quant aux possibles corrélations entre antécédents d'abus sexuels et préférences BDSM, elles n'apparaissent qu'en filigrane à travers certains commentaires, mais sont rarement évoquées ouvertement. Dans le cadre d’une enquête participative, un sondage a été réalisé par Osphères sur un site dédié au BDSM, destiné à apporter un éclairage quant à l'existence d'un lien entre pratiques BDSM et antécédents d'abus sexuels. Si son résultat ne peut prétendre à d’irréfutables certitudes, le nombre de participants étant trop faible pour produire des résultats généralisables, il a été observé que seulement 18% des sondés reconnaissent et assument le lien de cause à effet qui existe entre leur passé traumatique et leur orientation BDSM, que 13% admettent ne s'être jamais posé la question mais qu'il n'est pas exclu que ce lien existe. En revanche, 14% d'entre eux nient cette interaction et 55% déclarent n'avoir jamais subi de violences sexuelles. Si l'on scinde ce résultat en deux groupes comprenant d'une part les personnes n'ayant jamais été abusées ou violentées sexuellement et d'autre part celles l'ayant été, ces dernières représentent tout de même 45%, soit près de la moitié des personnes interrogées.
Les pratiques BDSM sont toutes, sans exception, des pratiques à risque.
Si l'application d'une bonne « fessée cul-nu » n'a rien en soi de très périlleux, l'utilisation de lames, cordes, aiguilles, cires et autres instruments électriques et/ou médicaux, les diverses méthodes de suspension, d'étouffement ou d'étranglement n'ont rien d'anodin et sont potentiellement dangereuses. Un certain nombre de faits divers ont relaté des accidents parfois mortels survenus en Italie, Grande-Bretagne, USA. On se souvient notamment de l’acteur David Carradine, retrouvé mort dans sa chambre d'hôtel à Bangkok. Il fut découvert par la police le jeudi 4 mai 2009 dans une penderie ; des cordes avaient été nouées autour de son cou et de ses parties génitales, ce qui ne laissait que peu de place au doute quant aux pratiques auxquelles il s’était livré. D’autres accidents, bien que non mortels, peuvent provoquer de graves blessures pouvant générer des handicaps physiques permanents (compression de certains nerfs).
D'autres dangers, plus sournois, sont intrinsèquement liés à la pratique BDSM et relèvent du domaine psychologique. Par définition, le rapport « D/s » implique une emprise psychologique et bien que les rares études sur la question de l'équilibre mental des pratiquants BDSM tendent à démontrer le contraire, les cas ne sont pas rares où la domination d'une personne naïve ou fragile conduit à la mise en danger de son intégrité physique et mentale, avec ou sans intention de nuire. Graves dépressions, suicides, faillites personnelles, désocialisation, rupture familiale, sont parmi les conséquences d'abus caractérisés, tombant par ailleurs sous le coup de la loi et n'ayant rien à voir avec une relation D/s saine et responsable, basée sur le respect et la confiance mutuels.
Un principe de précaution élémentaire consiste à se méfier, à priori, d'une tendance têtue à vouloir imposer comme étant normal voire supérieur, ce qu'un large consensus reçoit comme étant anormal, ou tout au moins hors normes, pour les plus tolérants. Dans le cas de cette étude, supposée révéler une différence d'équilibre émotionnel entre pratiquants BDSM et non BDSM, on ne peut que s'interroger. S'il est fait mention de l'ignorance des participants du but de l'étude, il va sans dire que le choix du panel comme des questions, constitue déjà en lui-même un début d'indication. Si je suis sélectionné sur un site BDSM, je me doute bien qu'il s'agit de me positionner par rapport à mes semblables « vanilles ». Cela ne suffirait-il pas à orienter mes réponses pour faire pencher la balance de l'ombre vers la lumière ?
Chercher à dédramatiser, à démystifier des pratiques sexuelles jusqu'alors jugées comme déviantes, perverses et ne pouvant être le fait que de dangereux détraqués est une chose, faire une vérité du résultat d'une étude dont l'objectivité est discutable, en est une autre. Bien sûr, les pratiquants de sexualités alternatives ne sont pas (en principe) des individus plus dingues que les autres, mais en faire de « meilleurs » spécimens, plus équilibrés, presque plus « normaux » relève d’un biais de justification.
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