Cannabis et sexualité
AVERTISSEMENT OSHPÈRES : le cannabis sous toutes ses formes est classé dans la catégorie des stupéfiants dont la possession, la consommation et la vente sont strictement interdites et réprimées par la loi française (article 222-37 du code pénal - Article L.3421-1 du Code de la santé publique)

Le cannabis, ami ou ennemi ?
Le cannabis qui pendant des années a subi les foudres de la répression, se trouve aujourd’hui sous les feux des projecteurs bienveillants de la presse. Hier affublée de tous les maux, la plante se pare désormais de toutes les vertus. Comme souvent, pour éviter de s’embarrasser avec les subtilités d’un sujet, les médias globalisent, parlent du cannabis comme d’une seule et même substance alors qu'il n'en est rien. Tout d’abord, il existe plusieurs types de cannabis, sativa, indica et ruderalis (chanvre sauvage), aux effets bien différents les uns des autres. Ensuite, chaque variété de cannabis comporte un nombre plus ou moins important de variantes. La culture industrialisée de la plante qui s’est développée en premier lieu en Hollande, bénéficiant du background des cultivateurs de tulipes, véritables orfèvres de l’hybridation, a permis de multiplier les versions, chacune ayant des propriétés spécifiques liées aux variations des taux des trois principaux cannabinoïdes présents dans la plante, THC, CBD et CBN. De plus, le cannabis peut se consommer sous forme de marijuana, fleurs séchées, ou de haschich, résine extraite des fleurs par tamisage puis compactée, et là encore les sensations obtenues ne sont pas identiques. Enfin, la nature de l'ivresse sera différente suivant que le cannabis aura été fumé ou ingéré. Nous le voyons, parler du cannabis en omettant de citer ces distinctions manque un peu de rigueur intellectuelle. Sans connaître ce que les usagers ont consommé et comment ils l'ont consommé, les conclusions tirées de leurs expériences ne sauraient par conséquent faire référence. En matière de sexualité, l’usage du cannabis peut engendrer le meilleur comme le pire. La catégorie de cannabis et les quantités consommées, sa forme ainsi que son mode d’absorption peuvent sublimer ou dégrader l’expérience érotique.
A titre anecdotique, nous assistons depuis peu à l’explosion de produits dérivés du cannabis à faible teneur en THC (moins de 1%) et fort taux de CBD. Profitant du flou législatif entourant la commercialisation du cannabis THC-free, quelques industriels ont développé une large gamme de lubrifiants censés intensifier le plaisir sexuel. Des lubrifiants qui, appliqués sur les zones génitales des femmes, stimuleraient le désir, accentueraient les sensations, faciliteraient l’orgasme et renforceraient même la santé vaginale ! Quand il s’agit de faire du business…
De l’usage du cannabis dans la relation intime.
Quelques rappels historiques.
L’association cannabis-sexualité a été prisée en Inde dès le 7ème siècle par les adeptes du tantrisme qui de nos jours encore consomment la plante au cours de leurs rituels sexuels sous forme de breuvage : le bhang. Les tantrikas, pour atteindre la "libération", recourent aux effets psycho-spirituel du cannabis avec l'idée de se transformer de corps et d'esprit. L’utilisation du cannabis dans la démarche spirituelle tantrique est censée ouvrir la porte des perceptions immatérielles et élever l’âme au-delà du réel dans un pur élan mystique. De mémoire d’homme, le tantrisme est la seule spiritualité alliant cannabis et sexualité.
À la fin des années 1960, lors de leurs voyages en Inde, les hippies ont redécouvert la marijuana et le haschich. Bien vite leur consommation s’est imposée dans le milieu libertaire américain comme le symbole d’un affranchissement du monde matérialiste, d’une ouverture sur l’amour universel et le divin. Mais si la plante, dans l'esprit tantrique, a la capacité de faire ressentir l’indicible communion entre l’être et la création qui l’entoure, elle est aussi une source d’ivresse qui peut se suffire à elle-même et, dans ce cas, n’être qu’un simple auxiliaire festif. Au fil des décennies, la consommation du cannabis s’est occidentalisée et le rapport au divin s’est dilué jusqu’à sa complète disparition dans les eaux tourmentées de la "défonce".
De la consommation raisonnée et consciente du cannabis.
Depuis quelques années cependant, se trouve quelques voix pour exprimer les bienfaits du cannabis dans le cadre d’un érotisme qui tend vers la fusion des âmes. L’empathie, cette faculté de reconnaître, de comprendre les sentiments et les émotions de l’autre, se trouverait renforcée par l’ivresse cannabique légère. D'ailleurs, certains affirment que les individus maîtrisant l’art de consommer la plante ressentent la jouissance de leur partenaire au plus profond de leur être, dans une communication implicite, une osmose spirituelle.
Pour que la consommation de cannabis soit érotiquement bénéfique plusieurs choses sont à prendre en compte. Comme nous l’avons précisé, la plante peut se trouver sous différentes formes, chacune ayant des propriétés spécifiques. Si certaines sont en mesure de magnifier les relations charnelles, d’autres au contraire tendraient à les déprécier.
C’est le cas du haschich. Qu’il soit fumé ou ingéré, le haschich a tendance à rendre l’esprit confus. Ceci est la conséquence de la compression de la résine cannabique qui transforme le THC en CBN ou cannabinol lequel procure des effets proches de ceux de l’alcool. Plus le haschich aura été compressé, plus son taux de CBN sera élevé et plus il induira des somnolences, des difficultés à rester concentré et une insensibilisation émotionnelle. Englué dans les effets du cannabinol, l’esprit divague, vagabonde, n’arrive pas à mettre la focale sur un point précis et s’égare dans des considérations aléatoires qui nuisent à la bonne expression de la libido. De plus, le haschich que l’on trouve en Europe ne présente aucune garantie de salubrité dans la mesure où il est presque impossible de connaître son degré d'altération. Pour augmenter leurs bénéfices, les revendeurs n’hésitent pas à couper le produit avec des substances dont certaines peuvent être extrêmement toxiques pour la santé. Il existe aussi depuis une dizaine d’années une production de haschich de synthèse dont la puissance psychotropique n’a d’équivalent que la nocivité. Le haschich tel que nous le trouvons en Occident est donc à proscrire sans réserve.
Le cannabis sous la forme marijuana, c’est-à-dire de fleurs séchées, a des propriétés différentes selon que les plants sont issus de la lignée sativa ou indica. Le cannabis indica procure un effet "stoned", proche de celui du haschich, de relaxant à soporifique. Cela est dû à une forte concentration en CBD ou cannabidiol, un cannabidoïde sédatif plus adapté au traitement thérapeutique d’appoint de certaines maladies qu’aux pratiques érotiques. Contrairement à ceux issus la famille indica, les plants sativa produisent des fleurs à faible taux de CBD, laissant ainsi au THC le pouvoir d’agir pleinement. La marijuana sativa induit un effet "high", l’individu se sent stimulé à la fois physiquement et intellectuellement. Sur le plan sexuel, cela se traduit par une appétence accrue, un boost de la libido, de la fantasmatique, une modification des ressentis qui deviennent plus profonds, plus intenses, une envie d’être en symbiose avec son partenaire, d’être attentifs à ses désirs. Pour les hommes, la marijuana sativa permet un meilleur contrôle de l’excitation et une capacité réelle pour l’éjaculation retardée. Attention, la marijuana n’est pas une solution à envisager lorsque l’on souffre d’éjaculation rapide, aucune étude n’ayant jamais démontré qu’elle pouvait être d’un quelconque secours pour régler cette problématique particulière.
Cela dit, il est important de préciser que pour tirer le meilleur parti de la fleur de sativa séchée il faut respecter certaines règles. Tout d’abord, il est préférable de choisir des sativa présentant des taux de THC inférieur à 20%, car le but n'est pas de se "mettre à l'envers". Il est aussi fortement déconseillé de mélanger alcool et cannabis, le premier prenant le pas sur le second, l’ivresse sera plus alcoolique que cannabique et donc d’un intérêt relatif pour l’expression érotique. Par ailleurs, il est indispensable de ne pas dépasser le stade de l’ivresse légère pour bénéficier au mieux des vertus érotiques de la marijuana sativa. Enfin, pour aller au-delà des effets positifs immédiats et toucher à un érotisme empreint de spiritualité, il sera nécessaire d’acquérir une parfaite maîtrise de soi dans l’ivresse. Le THC est un puissant psychoactif qu’il est indispensable de contrôler pour aller là où l’on désire aller, le fumeur de cannabis est comme le kayakiste engagé dans un rapide, soit il pagaie suffisamment vite et s’amuse du courant, soit il est pris par de ce dernier et finit dans les rochers. Comme nous l’avons souvent mis en avant, les notions d’apprentissage, d’initiation, de travail sont intimement liées à la sphère érotique.
Le cannabis, une plante à la chimie complexe.
L’acronyme THC signifie, TétraHydroCannabinol ou plus précisément, delta-9- tétrahydrocannabinol. Il est le cannabinoïde le plus connu de la plante cannabis et l’élément psychoactif le plus important. En fonction des variétés de cannabis, son taux varie de 1% à plus de 30%. Toutefois, la plante contient plus de soixante cannabinoïdes différents, dont les principaux sont, le tétrahydrocannabinol (THC), le cannabidiol (CBD) et le cannabinol (CBN), et d’autres molécules moins connues, les flavonoïdes, les terpènes et les terpénoïdes. Les recherches menées par Ben-Shabat et Mechoulam ont mis en évidence un effet d’entourage, une synergie entre les différents composés chimiques de la plante qui explique pourquoi chaque variété produit des effets qui lui sont propres. L’ensemble des cannabinoïdes sont des éléments organiques complexes qui agissent sur certains récepteurs spécifiques de notre organisme. Le THC modifie l’activité de différentes zones de l’encéphale et permet d’expérimenter un autre niveau de réalité. Si le THC n’induit aucune dépendance physique, à la différence de l’alcool, du tabac et de l’héroïne, le risque d’une accoutumance psychique est bien réel et une consommation excessive peut perturber le sommeil, provoquer des crises de tachycardie, une altération de la mémoire immédiate, des crises de paranoïa et des accès dépressifs. Notons que ces effets indésirables disparaissent sitôt que le consommateur cesse d’abuser de la substance.
De nouveau, nous rappelons que l'usage du cannabis, quelle que soit sa qualité, sa forme et son mode de consommation, reste un acte puni par la loi qui ne fait aucune différence entre drogues dites dures ou douces. L'article L. 3421-1 du code de la santé publique dispose que l'usage illicite de stupéfiants est puni d'un an d'emprisonnement et de 3 750€ d'amende, tandis que l'article 222-37 du code pénal réprime le transport, la détention, l'offre, la cession, l'acquisition ou l'emploi illicites de stupéfiants par une peine de dix ans d'emprisonnement et de 7 500 000 euros d'amende. En l'état actuel des choses en France, il appartient donc à chacun(e) de prendre conscience des risques qu'il encoure à consommer du cannabis.
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