J'ai confié un fantasme et ma compagne l'a mal pris
Diplômé de l'Institut de Sexologie du docteur Jacques Waynberg, Eric Royer répond aux questions des abonnés.es.

Dire ses fantasmes, la fausse bonne idée ?
Luca, 41 ans, artisan ébéniste
Récemment j’ai eu des envies uro avec ma compagne et je lui ai demandé si elle serait d’accord pour me ****** dessus. Je n’avais jamais pensé au truc avant, je ne sais pas pourquoi c’est venu subitement, mais je suis curieux, je voulais essayer et j’ai cru que ça pourrait nous rapprocher. Mais depuis ma partenaire me trouve dégoûtant et me repousse. Je me sens blessé et honteux. Nous sommes ensemble depuis de nombreuses années et les choses tournent au vinaigre. Que dois-je faire ?
Ce que j'en pense
Très clairement vous avez mis votre couple dans une situation délicate, tout simplement parce que votre « confession » a suscité le dégoût de votre partenaire, une dynamique émotionnelle qui rend vous rend repoussant et fragilise votre relation.
Le sentiment de dégoût, qui s'enracine dans nos premiers contacts avec « l’immangeable », produit une émotion qui se traduit généralement par un mouvement de tête vers l’arrière et le côté, un froncement des cils, un plissement des yeux, une projection des bras vers l'avant et un rictus particulier de la bouche. D'un point de vue éthologique, cette réaction corporelle réflexe révèle une injonction à prendre de la distance avec l’objet du dégoût, l'acquisition d'un pattern comportemental indispensable à la survie.
La proxémie entre l’alimentation et la sexualité érogène se manifeste, entre autres, par des émotions de nature comparable lorsque pointe le sentiment de dégoût. Vous êtes aujourd’hui objet de dégoût sexuel aux yeux de votre compagne. La force d’éros qui vous liait à elle se trouve maintenant supplantée par une autre qui motive un processus d’éloignement, de séparation, de distanciation physique.
La question n’était pas celle de la nature de votre fantasme, mais plus sûrement d’un défaut de discernement qui vous a conduit à croire que votre compagne était en capacité de discuter du sujet en toute confiance, en toute sérénité. Je peux supposer, contrairement à ce que vous laissez entendre, que ce fantasme vous a suffisamment « taraudé » pour que vous vous hasardiez à en révéler le « secret ». Que l’urophilie ne soit pas le propos premier, n’interdit pas de préciser qu’elle n’anime qu’une portion très réduite d’entre nous. La probabilité que votre compagne ait été naturellement en adéquation érotique avec ses pratiques était extrêmement faible.
S’il est important de communiquer, d’exprimer ses désirs, ses fantasmes, il l’est tout autant de le faire step by step et dans le bon tempo. Autrement dit dans un temps où le degré de complicité érotique permet un brin d’audace supplémentaire, que ce soit dans le discours ou le passage à l’acte. De toute évidence vous avez brulé les étapes, mal jugé du champ érogène, du potentiel aphrodisiaque, de votre partenaire, priorisé vos désirs au péril de la stabilité émotionnelle de votre couple.
Comme remarqué précédemment, le dégoût que vous avez inspiré, va laisser des traces et infecter durablement le potentiel érotique de votre compagne. Vous avez déjà noté des changements et vos relations intimes en sont affectées, je vous conseille vivement de consulter, en couple, un ou une sexologue. J’espère que vous comprendrez la radicalité de ma réponse.
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