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L'adultère : une histoire d'amour contrarié

L'adultère : une histoire d'amour contrarié

L'adultère : une histoire d'amour contrarié

Les comportements adultères : le sombre pendant de l'union maritale.

D’après le Petit Larousse : « L’adultère est le fait pour un époux de violer le serment de fidélité et d’avoir des relations sexuelles avec une personne autre que son conjoint envers qui il a affirmé ce serment. » Qu’ils soient de tradition orale ou écrite l’interdiction et le tabou de l’adultère font partie des codes du mariage de presque toutes les sociétés et les infidèles se sont exposés au cours des siècles à des sanctions allant de l’opprobre à la peine de mort.

L'adultère en bref dans l'histoire.

Dans la Mésopotamie antique, quelques 18 siècles avant notre ère, on ne plaisante pas avec les contrevenants aux règles sacrées du mariage et les adultérins sont passibles de la peine de mort par noyade. Chez les grecs anciens et les romains la condamnation de l’adultère a des implications différentes selon que l’on est homme ou femme. L’épouse dans l’Athènes classique n’est pas autorisée à sortir du cadre des relations sexuelles strictement conjugales alors que l’époux n’est pas tenu au devoir de fidélité. En cas de manquement la femme infidèle n’est pas lapidée, comme dans d’autres cités grecques, mais répudiée et mise au ban de la société. Au temps de la République romaine, l’amant pour éviter la vindicte du mari trompé a l’opportunité de se racheter en payant le prix du pacte de paix consenti par ce dernier, quand la femme surprise en flagrant délit risque d’être tuée sur le champ. Le traitement différencié de la faute marque une volonté de déresponsabiliser l’homme et sous-tend déjà l’excuse de la pulsion sexuelle irrépressible.

Au fil du temps, le concept de la femme tentatrice s’enracinant comme cause principale de l’adultère implique qu’on lui réserve les châtiments les plus durs et les plus humiliants. Ainsi en vielle Saxe, une lettre de Saint Boniface au roi de Mercie, Aethelbald, mentionne : « Si une femme mariée, a perpétré l’adultère, elle est parfois forcée à terminer sa vie en se pendant de sa propre main…parfois aussi, les femmes après l’avoir fouettée la mènent par les pays alentours, ses vêtements déchirés jusqu’à la ceinture, en la frappant de verges. Elles lui piquent et lui entaillent tout le corps avec des couteaux… » 

Adultère et religions.

Si chrétiens, juifs et musulmans se retrouvent autour des préceptes de condamnation sans équivoque des relations adultères, leur appréciation des sanctions à appliquer diffère du tout au tout. Chez les premiers, le possible pardon d'un dieu miséricordieux est signifié par l’attitude du Christ (Jean 8, 1-11) face à une femme accusée d’adultère : « Que celui qui n’a jamais péché lui jette la première pierre. » Si les juifs n’appliquent plus de nos jours le châtiment de lapidation - l’adultère de la femme restant selon la Thora un des plus graves péchés qui soient, comparable au meurtre et à l’idolâtrie - ils imposent à la fautive de divorcer sur le champ. En mars 2019, un tribunal rabbinique israélien a toutefois jugé que tromper son mari avec une femme ne constituait pas un adultère. Signe des temps ? De leur côté les musulmans s’appuyant sur un argument coranique fourni par l’islam ont élaboré une approche juridique de la fornication, et par extension exégétique de l’adultère, conduisant à une condamnation pénale de tout acte sexuel en dehors du mariage légal. Le deuxième verset de la sourate 24, selon la traduction standard, mentionne : « La fornicatrice et le fornicateur, fouettez-les chacun de cent coups de fouet. Et ne soyez point pris de pitié pour eux dans l’exécution de la loi d’Allah. » Quant à la lapidation, toujours appliquée par quelques groupes islamistes se référant au concept de Charia, et depuis 2019 par l’État de  Brunei, elle ne serait pas en lien avec cet unique verset coranique dédié à la fornication (adultère), mais avec un vrai-faux verset, non inscrit dans le Coran par la faute d'une chèvre maligne ayant dévoré le papyrus sur lequel il était noté.

La fidélité maritale, un concept mouvant.

Le sort que l’on réserve aux amants adultères reflète le degré d’importance que les sociétés accordent au mariage, pourtant il en est où l’infidélité n’est pas systématiquement condamnée, la valeur des liens maritaux n’étant pas conjointe à des obligations de stricte fidélité. Ainsi les Peuls ont vis-à-vis de l’adultère, dans les faits et le discours, une attitude relativement indulgente. Car, comme le souligne Danièle Kintz dans « L’art peul de l’adultère », le phénomène est perçu comme pratiquement inévitable et sanctionné seulement sur la base d’un manque de discrétion l’ayant rendu visible aux yeux de tous. D’autres entorses à la fidélité sont autorisées par exemple chez les Inuits, dans le cadre de l’hospitalité sexuelle ou un mari peut convenir d’offrir sa femme à un ami de passage. Jorn Riel, écrivain Danois, y fait de nombreuses fois référence dans les trois tomes de « La maison de mes pères ». Cela étant, il est sans doute exagéré, en l’espèce, de définir par adultère une pratique sociale encadrée par les lois de l’hospitalité. 

Depuis les années 70, la notion d’adultère a perdu de sa véhémence en Occident où l’on accorde quelques excuses à l’adultérin pris dans une relation maritale qui ne donne plus les fruits escomptés. Et d’une manière générale, hormis dans les pays appliquant la charia, il semble que s’amorce dans le reste du monde un assouplissement des sanctions applicables aux adultérins. On citera l’Inde où une loi datant de l’ère coloniale reconnaissant la femme comme propriété de l’homme et criminalisant l’adultère a été abrogée en 2018. 

La volonté universelle de sanctionner les relations adultères a été relative à l’ambition des groupements humains de protéger le mariage perçu comme un élément de stabilisation de l’organisation sociale. Aujourd’hui, au moins en Occident, l’idée que l’adultère puisse nuire à la société est certainement moins prégnante et les liaisons extra-conjugales ne sont plus systématiquement couvertes d’opprobres. Serait-ce la raison pour laquelle il ressort de différents sondages une propension accrue pour les infidélités ? Et au fond quelles sont les raisons qui poussent à trahir le pacte conjugal ? Autant de questions auxquelles nous tenterons de répondre dans la deuxième partie de cet article.

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