Témoignage : la perte d'appétit pour la sexualité érogène
Diplômé de l'Institut de Sexologie du docteur Jacques Waynberg, Eric Royer répond aux questions des abonnés.es.

La dynamique érogène à l'épreuve de l'insatisfaction
Félicien, 28 ans, prestataire de services
Je suis marié depuis trois ans à une femme magnifique de 32 ans, mais depuis six mois environ elle ne m’attire plus sexuellement parlant. Au départ de notre relation et pendant les deux premières années de notre vie de couple le sexe était super. Mais comme je l’ai dit, depuis quelques temps je ne m’y retrouve plus du fait que mon épouse manque de passion à mon goût et qu’elle est rarement à l’initiative. Nous en avons parlé. Pour elle c’est une question de timidité, mais elle affirme qu’elle comprend bien qu’elle doit faire des efforts. Il y a un mois elle est venu vers moi en me disant "on devrait faire du sexe ce soir" sans entrain, sans énergie, ce qui m’a démotivé pour répondre à sa proposition. Depuis elle refuse toute discussion sur le sujet. Elle est toujours aussi adorable, attentionnée, mais je n’ai plus la patience et je ne comprends pas pourquoi ça ne fonctionne plus, d’autant que nous sommes encore un jeune couple. Je ne sais pas quoi faire.
Ce que j’en pense
Si je m’en tiens à votre témoignage (bien que sincèrement je pressente que vous ayez passé sous silence certains éléments de votre histoire) il semble que les deux premières années de votre relation ait été érotiquement satisfaisantes, au moins pour vous. Je peux supposer que votre épouse était alors suffisamment « passionnée » à vos yeux, ou du moins essayait-elle de l’être. Je dis "essayait-elle", parce que dans les premiers temps d’une relation romantique, les femmes peuvent se montrer excessivement complaisantes, excessivement indulgentes, face à l’indigence érotique, le manque de savoir-faire, de leur partenaire. Cela n’est sans doute pas agréable à entendre, et sans doute auriez-vous préféré que j’abonde dans votre sens, mais son manque d’entrain, de passion, son absence d’initiative, laisse entendre que l’historique des expériences érotiques n’est pas suffisamment motivant, émotionnellement gratifiant, pour qu’elle manifeste un enthousiasme débordant pour la chose. J’ai la forte impression que ne voulant pas vous perdre elle s’acquitte, en s’impliquant a minima, de ce que l’on nommait autrefois le devoir conjugal. Qu’elle refuse maintenant toute discussion sur le sujet ne me surprend guère, au regard de l’hypothèse que je viens d’émettre. En d’autres termes, elle ne souhaite plus être mise sur la sellette ou endosser l’entière responsabilité de la dégradation de votre relation intime. Maintenant il s’agit d’ouvrir la discussion, non sur ce qu’elle devrait faire, mais sur ce qui ne lui convient pas, sur ce qu’elle n’ose, par timidité, par amour, vous avouer de démotivant dans l'exercice de votre sexualité érogène.
Cela dit, en conjecturant au-delà de votre témoignage, il se peut aussi qu’un changement de situation professionnelle, familiale, un déménagement, un soucis de santé, ou que sais-je encore, lui occupe suffisamment l’esprit pour que la « bagatelle » ne s’inscrivent plus dans la liste de ses priorités.
Enfin, j'aimerai vous faire remarquer que l'appétit pour la sexualité érogène n'est pas, à l'opposée de la sexualité reproductive, une donnée naturelle, qu'il est nécessaire que les expériences soient concluantes pour que s'enclenche la dynamique du désir...
Les réflexions proposées s’établissent sur les faits que vous rapportez. Pour poser un diagnostic il est indispensable d'avoir la vision la plus holistique possible de votre situation et la consultation en couple est la seule option envisageable.
* Crédit illustration : Georges Corm.
{reply-to}{comment}{status-info}
Poster un commentaire