Sphère fonctionnelle

Transgenre et transidentité

Transgenre et transidentité

Transgenre et transidentité

La nature nous assigne un sexe, nous sommes du point de vue biologique soit des femmes, soit des hommes.

Nous ne parlerons pas ici des hermaphrodites, catégorie d’individus dont la nature très spécifique invite à un article dédié. Si dans une grande majorité nous nous sentons à l’aise avec notre sexe biologique, ce qui revient à dire que notre psychisme est en accord avec ce dernier, pour une minorité d’entre nous, le biologique semble être en désaccord avec le psychique. Il est donc des individus de sexe féminin qui ont développé un psychisme typiquement masculin, inversement des individus de sexe masculin qui ont une construction psychique féminine et enfin, d’autres qui ne se sentent psychiquement ni l’un ni l’autre, ou les deux en même temps, ou encore parfois l’un et parfois l’autre. Ces personnes qui sont le siège d’un apparent tiraillement psychobiologique, se regroupent dans un ensemble nommé transgenre. La transidentité nous montre encore une fois, par la multiplicité de ses expressions, l’incroyable complexité, la superbe multiplicité de la nature humaine. 

La transidentité doit nous pousser à comprendre l’humain comme une diversité absolue, un ensemble de cas d’espèces ayant, les uns vis-à-vis des autres, autant de similitudes que de divergences.

La stigmatisation dont souffre les transgenres, que ce soit dans le noyau familial ou dans la sphère sociétale, n’est que l’expression de notre appréhension, de notre inquiétude face au singulier. Si l’humain nous était enseigné dans sa vraie nature, complexe et multiforme, nous pourrions sortir de la fondrière dans laquelle sa conception normative nous a entrainés. Si les transgenres n’étaient plus vus comme des exceptions à la règle mais comme des composantes naturelles du genre humain, ils vivraient certainement plus sereinement. Qu’est-ce qui pourrait empêcher un homme biologique de vivre en toute quiétude avec un psychisme purement féminin, si ce n’est l’intériorisation de normes dont les fondements conceptuels sont absolument discutables ? Finalement, on peut se demander ce qui, de la norme sociétale ou de leur nature trans, fait le plus souffrir les transgenres. 

Il n’est donc pas facile de vivre son extra-ordinarité dans une société qui aime la normalité et ne sait comment s’y prendre avec l’exceptionnel. Il est vrai que tout serait beaucoup plus simple si la bichromie, rose/bleu, était de mise dans le genre humain. Des femmes avec des vulves attirées par les hommes et des hommes avec des pénis attirées par les femmes. Il faut admettre que nous aimons l’ordonnancement simple des tiroirs bien étiquetés dans lesquels il est possible de caser tout un chacun sans coup férir. Dès lors qu’un individu n'entre dans aucune des cases, une sorte de panique s’empare de nous. Les transgenres sont à cet égard terriblement anxiogènes et révélateurs de nos peurs de l’étrange, du hors norme. N’étant ni homme ni femme tout en étant les deux à la fois, ils s’accorderaient plus facilement aux principes de la physique quantique qu’à ceux de la mécanique générale. Il est donc vain de vouloir les faire répondre à nos exigences, vain et certainement dangereux pour eux. 

Les transgenres sont en proie à de vives souffrances psychologiques dont l’origine est aussi bien exogène qu'endogène.

Ces souffrances sont le résultat de facteurs exogènes, tel le regard stigmatisant que porte la société sur leur nature paradoxale, et de facteurs endogènes résultant de la détestation d’un corps dans lequel ils se sentent pour le moins mal à l’aise. Quelles que soient leurs causes, ces souffrances s’accompagnent de conséquences qui peuvent être dramatiques. Anxiété, dépression, addictions, pulsions suicidaires sont chez les transgenres plus fréquents que dans le reste de la population. S’il existe des possibilités hormonales et chirurgicales de réassignation sexuelle, les bénéfices en matière de bien-être psychologique ne sont pas toujours au rendez-vous, comme l'illustre le cas de Walt Heyer. Convaincu par un spécialiste de la question trans d’être un cas typique de dysphorie du genre, il donne à 42 ans son accord pour une opération chirurgicale de réaffectation sexuelle. Walt Heyer devient pendant huit ans Lauren Jensen, une femme à part entière. Mais les troubles psychologiques et la souffrance de Walt Heyer persistent dans la peau de Laura Jensen et après huit années infructueuses, Laura Jensen décide de redevenir Walt Heyer. Bien sûr, ce cas ne saurait à lui seul jeter le discrédit sur un processus chirurgical qui, en d’autres situations, s’est avéré efficace. 

La réassignation sexuelle, pour un mieux être ?

La réassignation ou réattribution sexuelle est soumise au test de vie réelle qui impose au candidat de vivre comme un membre du genre désiré au moins pendant une année. Cette expérience doit donner l’assurance que l’individu est mentalement armé pour assumer pleinement sa transformation. Cela étant, des différents témoignages que nous avons lu sur le sujet, ressort une certitude : l’impossibilité de prédire les effets psychologiques de la réattribution sexuelle. Il n'est pas question ici de porter un jugement de quelle que nature que ce soit sur le process, chaque personne étant à même de définir ce qui est bon pour elle, mais peut-être d'amener quelques éléments de réflexion pour contrebalancer un discours parfois béat d'optimisme.

Même si la chirurgie fait des progrès, une vulve et un vagin reconstitués ne seront jamais une vulve et un vagin véritables, idem pour le pénis.  C'est dur à dire, mais c'est une réalité. Dès lors comment doit-on comprendre l’agression que certains transgenres sont prêts à faire subir à leur corps, pour des résultats esthétique, fonctionnel et psychologique hypothétiques ? Confrontés à un système de représentation bivalent de l’humain duquel ils sont exclus de fait, les transgenres ne sont-ils pas condamnés à détester les manifestations ostensibles de leur supposée anormalité et tentés de les faire disparaître ? Seuls celles et ceux qui n’ont jamais été rejetés d’un groupe peuvent ignorer la violence générée par l’exclusion. Quels sacrifices ne serait-on pas prêt à faire pour être accepté en tant que membre à part entière d'un groupe ou d'une communauté ? Quand les standards de beauté sont corrélés à une maigreur extrême, combien de femmes s’imposent le supplice de régimes draconiens pour se conformer au canon de perfection ?
 

D’une autre manière, prétendre par une psychothérapie permettre aux trans d’aligner leur psyché à leur corporalité résulte de la même idéologie archaïque. Quelle vanité peut nous pousser à vouloir supprimer une diversité, une richesse humaine ? Sans nier le malaise psychologique qui envahit les transgenres, nous ne croyons pas à la pertinence d’une approche thérapeutique qui tend à faire croire que le bonheur est dans la standardisation. Que l’on aide les transgenres, si tel est leur désir, à mieux vivre leur extraordinarité est une idée plus acceptable mais qui continue d’enraciner la croyance d’un trouble de la personnalité. Même si dans la dernière version du DSM, Manuel de Diagnostic et Statistique des troubles mentaux, les trans ne sont plus considérés comme des malades mentaux, ils n’y restent pas moins inscrits. On croit rêver, mais non : au 21ème siècle nos modes de penser sont toujours aussi dramatiquement délétères. Imaginons une société dans laquelle la transidentité serait pleinement acceptée, et pourquoi pas vénérée comme l'expression parfaite de la complétude féminin/masculin, combien de transgenres seraient en souffrance au point de souhaiter une réassignation sexuelle ?

Poster un commentaire

Dans la même thématique

Osphères c'est avant tout...

Une information fiable, objective et diversifiée

Une approche décomplexée, éthique et responsable de la sexualité et de l’érotisme

Un espace privilégié de rencontres et d'échanges

Un univers où prévalent les principes de respect, de courtoisie et d’ouverture.

X