Contre la pornification des relations interpersonnelles : l’éducation à la sexualité !
En réalité, il n’existerait qu’une seule solution pour endiguer définitivement la diffusion de pornographie : une mobilisation internationale en vue de l’interdiction pure et simple de toute production à caractère pornographique.

L'Arcom ne pourra rien changer, ou presque
Après des décennies de laisser faire, au prétexte de liberté d’expression, la pornographie est aujourd’hui dans le viseur des pouvoirs publics. On s’en félicite d’autant plus que nous en sommes convaincus depuis longtemps : la consommation de contenus pornos est consubstantielle à une perversion de la fonction érotique, à une aliénation de la pensée relationnelle qui interdit la prise en compte de la subjectivité émotionnelle de l’autre. Au fil du temps le pornophile perd toute capacité à l’émotion érogène romantique car sa fantasmatique est modelée par l'érotisation de la violence sexuelle. Sous influence pornographique, l’expérience érotique se déshumanise, se désacralise, et s'accorde avec un mimétisme gestuel et comportemental porno : il s’agit de faire du sexe sans autre ambition que d’en jouir le plus trivialement, le plus brutalement, le plus stupidement possible.
On note depuis quelques années une désaffection des jeunes générations pour la sexualité érogène. Il en est ainsi pour 40% des jeunes de 18 à 24 ans. Et il n’y rien d’étonnant, car pour accepter de s’investir dans l’aventure intime, il est à la fois nécessaire d’avoir confiance en soi et confiance en l’autre. Le modèle proposé, imposé par la pornographie omniprésente, validé par sa glamourisation médiatique, leur montre des corps à l'esthétique standardisée et des attitudes, des postures empreintes d'objectification. Dans ces conditions la perspective d’une première rencontre intime se couvre d’un voile suffisamment anxiogène pour que soit repoussée sine die l’occasion de son initiation.
Dans un article du 7 mai 2023, Le Monde titrait : « Pornographie en ligne : le gouvernement veut renforcer les pouvoirs de l’Arcom pour protéger les mineurs ». Toutefois, pour louable que soit l’intention, il faudrait ne pas comprendre ce qu’est internet pour croire qu’une requête d’authentification, par le biais d’un document d’identité certifiant la majorité du candidat, changera radicalement la donne. Il faudrait surtout ne pas être au fait de l’habileté que les jeunes générations manifestent en matière de contournement des interdictions informatiques. Par ailleurs, soyons pragmatiques, il suffira d’un grand frère ou d’un copain majeur quelque peu conciliants pour ouvrir l'accès à un compte certifié. On peut même anticiper que certains en feront un petit commerce. Rappelons que plus de vingt millions de sites dédiés à la pornographie prospèrent sur le net, qu’il sera en conséquence difficile de bloquer tous ceux qui refusent de se soumettre à la loi française. Enfin, remarquons qu’existent des tutoriels spécifiquement fléchés sur le déblocage de site bloqué ou censuré.
En réalité, il n’existerait qu’une seule solution pour endiguer définitivement la diffusion de pornographie : une mobilisation internationale en vue de l’interdiction pure et simple de toute production à caractère pornographique. Mais on comprendra que la radicalité de l’option n’est envisageable qu’au titre de l’utopie sociétale. De fait, puisque le combat sur le terrain du net est voué à l’échec, ne reste que la perspective d’une éducation à la sexualité. C’est pourquoi l’écosexologie milite en sa faveur et apporte son soutien le plus complet aux objectifs de l’Éducation nationale. Ce n’est que par l’entremise d’un discours sexo-éducatif, exempt de fausse pudeur, qu’il sera possible de lutter contre la pornification des comportements et des relations interpersonnelles…
Crédit illustration : Reproduction d'une chambre à coucher réalisée par des étudiants de l'école secondaire Eulalie Durocher. Photo : Léa Beaulieu Kratchanov.
{reply-to}{comment}{status-info}
Poster un commentaire