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Francine Shapiro, la mère de l'EMDR, est décédée.

Francine Shapiro, la mère de l'EMDR, est décédée.

Francine Shapiro, la mère de l'EMDR, est décédée.

Francine Shapiro, psychologue américaine ayant mis au point la technique EMDR est morte la nuit dernière.


Francine luttait depuis de nombreuses années contre le cancer, c'est finalement la maladie qui a eu le dernier mot et l'a emportée le 18 juin 2019.

Les principes de l'EMDR : Eye Movement Desensitization and Reprocessing, soit désensibilisation et reprogrammation par mouvements oculaires, ont été découverts par hasard en 1987 par une doctorante en littérature, Francine Shapiro. D'une surprenante efficacité pour soigner les victimes de SPT (Stress Post Traumatique), cette technique est également prometteuse dans le cadre des traitements des troubles du comportement alimentaire (TCA) et de certaines phobies. En contribuant à faire voyager le stockage de nos souvenirs d'un hémisphère cérébral à l'autre, l'EMDR permettrait de désamorcer leur charge émotionnelle pour en faire des épisodes plus facilement verbalisables et dégagés de leur contexte initial. (1)

Un intérêt personnel pour SPT.

Le choc ; à l'âge de 30 ans, Francine Shapiro apprend qu'elle est atteinte d'un cancer. Les médecins n'en connaissent ni les causes, ni les probabilités de récidive. À sa rémission, ils ne peuvent que lui souhaiter "bonne chance". Elle se plonge alors dans l'étude du stress et ses effets sur l'organisme et plus particulièrement sur les phénomènes de rechute d'un cancer. Décidée à lutter contre une éventuelle récidive de son cancer, elle s'initie à la psychologie ainsi qu'à différentes techniques de psychothérapie, en posant la focale sur le lien entre le corps et l'esprit et l'influence de l'état émotionnel sur l'organisme. 

Je terminais un doctorat en littérature anglaise, mais la maladie a porté mon attention sur le domaine alors nouveau de la psycho-neuro-immunologie, soit l’effet du stress sur le système immunitaire. Même si les théories étaient excellentes et faisaient sens, il ne semblait guère y avoir de techniques ou de procédures pour aider à gérer la relation corps/esprit. Cela me fascinait, et je voulais voir ce qui était disponible afin de le transmettre au grand public. J’ai quitté New York pour suivre de nombreux stages et ateliers. Cela me conduisit à une thèse de psychologie.


En 2014, une conférence de l’association EMDR Europe a mentionné certaines recherches faisant état de symptômes de stress post-traumatique chez des personnes atteintes d'un cancer, vraisemblablement liés au choc ressenti à l'annonce du diagnostic.

Au hasard d'une promenade, la révélation.

Lors d'une promenade dans un parc, balayant du regard le paysage qui l'entourait, elle remarqua que les pensées négatives qui l'assaillaient avaient subitement disparu. Les reconvoquant consciemment, elle constata qu'elles s'étaient délestées d'une grande part de leur charge émotionnelle. Le fait lui parut étrange, attendu que ce type de pensées ne se modifient généralement pas sans intervention consciente de la volonté. Or, elle n'avait rien fait délibérément. En exécutant intentionnellement un mouvement des yeux de droite à gauche et inversement, elle s'aperçut que le résultat était identique. Intriguée par cette découverte fortuite, elle voulut s'assurer que cette technique ne fonctionnait pas seulement sur elle. Elle entreprit donc des essais cliniques, d'abord sur un groupe de volontaires en 1987, puis sur des vétérans du Vietnam, en tant que psychologue au Mental Research de Palo Alto.

Je leur faisais suivre mon doigt du regard, et les problèmes leur paraissaient plus supportables. Sauf pour certains : j’ai alors développé des procédures basées sur certains mouvements oculaires pour augmenter les effets. Après avoir travaillé avec environ 70 ou 80 bénévoles, j’ai utilisé mes procédures avec un groupe de victimes de traumatismes dans un essai contrôlé randomisé, et j’ai publié mes résultats dans le Journal of Traumatic Stress en 1989. Ce fut la première publication concernant ce qui est maintenant l’EMDR.


L'EMDR, l'héritage d'une grande dame.

Il a fallu de nombreuses études pour que la thérapie EMDR soit prise au sérieux. Mais à présent, les faits sont établis : l’Organisation mondiale de la santé, par exemple, a déclaré que les thérapies comportementales et cognitives (TCC) et la thérapie EMDR sont les deux seules formes de psychothérapie recommandées pour traiter les enfants, les adolescents et les adultes en état de stress post-traumatique (ESPT). 

Aujourd'hui, le monde de la psychologie perd une grande dame, dont la volonté et la curiosité scientifique auront permis d'alléger le fardeau de milliers de victimes de traumatismes. A cet instant, nous ne savons pas si c'est la maladie qui l'a finalement emportée.




1 - « Comment j'ai découvert l'EMDR » Entretien avec Francine Shapiro. Propos recueillis par Jean-François Marmion pour Le Cercle Psy.

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