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Harcèlement sexuel en haute altitude

Harcèlement sexuel en haute altitude

Harcèlement sexuel en haute altitude

Si les voyages en avion sont excitants et glamours, rien ne peut excuser les comportements inappropriés dont sont victimes les hôtesses de l’air.

Alors que l’aviation semble être au firmament de son développement en matière de performance technologique, de nombreux témoignages indiquent que les comportements envers le personnel féminin, sont eux de moins en moins évolués. Il faut dire que les compagnies aériennes n’hésitent pas, que ce soit dans les pubs ou dans les vidéos de divertissement à destination des passagers, à sexualiser les femmes pour attirer l’attention du consommateur.

Récemment, un avion a dû faire une escale forcée suite à l’attitude insultante et sexuellement déplacée d’un passager envers une hôtesse de l’air. Aussi choquant que cela puisse paraître, ce genre d’incident est de plus en plus courant. Un rapport publié en 2014 a révélé qu’un tiers du personnel féminin navigant avait subi, dans l’année écoulée, diverses formes de harcèlement sexuel : blagues graveleuses, regards soutenus, gestes déplacés et demandes explicites de relations sexuelles. 

Les compagnies aériennes qui, à des fins publicitaires, sexualisent la gent féminine, doivent prendre leurs responsabilités. 

Il y a un demi-siècle de cela, la compagnie Pan Am and National Airlines affichait des photos d'hôtesses avec la légende sexiste : "I’m Cheryl. Fly me" ou "I’m Jo. Fly me", ce que l’on pourrait traduire par : "Je suis Jo. Fais-moi décoller".

Cinquante ans après, nous sommes toujours dans le même registre avec des pubs qui mettent en avant le côté glamour et sexy des hôtesses de l’air. On peut citer une pub Virgin où une hôtesse en talons aiguilles rouges se fait reluquer par des hommes d’affaires avec la légende : "Still Red Hot", (Toujours chaude). En 2010, la compagnie Russe Avianova assurait sa promotion avec un clip pour le moins sexiste où de jeunes et belles hôtesses en bikini lavaient un avion dans des poses très suggestives. Que dire de Ryanair et de son calendrier où de véritables hôtesses posaient en bikini sous le slogan : "Red Hot Fares and Crew", (Des clients et des hôtesses chauds bouillants) ?

Jo-Ann Davidson, en charge de l’association australienne des personnels volants, a clairement émis l’hypothèse d’une corrélation entre les représentations libidineuses des hôtesses et les traitements dont elles sont victimes. "En présentant les hôtesses comme faisant partie des produits qu’elles vendent, les compagnies envoient un mauvais message et font courir des risques de maltraitance et de harcèlement sexuel au personnel féminin".

L’idée que les hôtesses doivent être désirables est on ne peut plus présente dans les codes vestimentaires qui leur sont imposés. Coupe de cheveux, maquillage, talons aiguilles, couleur du vernis à ongle sont autant de choses qui n’ont rien à voir avec les aptitudes requises pour faire le job. Beaucoup de femmes rapportent que les tenues imposées dans la profession les mettent mal à l’aise. L’une d’elle confie : "C’est très humiliant de devoir porter des vêtements qui ont pour but de sexualiser mon apparence et mettre en exergue ma sexualité. Aucune des tenues que portent les hommes n’est prévue à cet effet. Ils ont toujours l’air très smarts, impeccables et jamais on ne leur demande de mettre en avant leur sexualité pour promouvoir l’image de leur compagnie." 

Dans le milieu, les stéréotypes sont très enracinés. Richard Branson, le fondateur de Virgin Atlantic, ne rate jamais l’occasion de poser auprès d’une fille en bikini quand il s’agit de lancer une nouvelle entreprise, comme récemment pour la création de Virgin Voyages. Branson est tellement fan du corps des femmes comme accessoire publicitaire, qu’il a inspiré la création d’un blog, " Richard Branson et les femmes."

Accusé de sexisme en 2009, il s’est défendu en arguant le fait qu’aucun média ne publierait une photo de lui entouré de quelques beaux mâles et donc que personne ne parlerait du produit ou de la société dont il est censé assurer la promo. L’argument est éculé, mais il sert encore. Au-delà de l’aspect misérable de cette conception publicitaire, n’est-il pas légitime de se poser la question de son impact sur les usagers et sur les hôtesses dans leur cadre de travail ?


Ces dernières années, quelques progrès ont été faits. En 2015, Qatar Airways a supprimé le licenciement des femmes pour cause de mariage ou de grossesse, après avoir été condamné par l’Organisation Internationale du travail, une agence de l’ONU. En 2014, Ryanair a abandonné, après quelques réticences, son calendrier agrémenté de photos d’hôtesses en petite tenue. Enfin, le personnel féminin de British Airways, après une bataille de deux ans, a gagné le droit de travailler en pantalon.

Soulignons que le sexisme opérant dans le monde des compagnies aériennes n’a pas d’équivalent ailleurs. Il est certain que le côté traditionnellement glamour et excitant du voyage en avion a favorisé cette dérive sexiste. Cependant, rien ne peut justifier que l’on transforme les femmes en objets sexuels dans l’espoir d’appâter le client, surtout lorsque le niveau de harcèlement dans la société est aussi élevé. En conclusion, nous reprendrons un slogan féministe bien connu : "Si ta compagnie est vraiment top, pas besoin de sexisme pour la vendre".


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