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L'androgyne

L'androgyne

L'androgyne

Le terme "androgyne" est emprunté au grec ἀνδρόγυνος, androgunos, composé de anêr, andros (homme) et de γυνή, gunê (femme).

La créature androgyne était représentée par la mythologie comme la première expression de l'espèce humaine, qui possédait toutes les caractéristiques de l'homme et de la femme réunies. Le Banquet de Platon décrit cette créature mythique : "C'était l'espèce androgyne qui avait la forme et le nom des deux autres, mâle et femelle, dont elle était formée ; aujourd'hui elle n'existe plus et c'est un nom décrié. De plus chaque homme était dans son ensemble de forme ronde, avec un dos et des flancs arrondis, quatre mains, autant de jambes, deux visages tout à fait pareils sur un cou rond, et sur ces deux visages opposés une seule tête, quatre oreilles, deux organes de la génération et tout le reste à l'avenant." Le mythe platonicien relate le défi des androgynes, d'une force et d'une vigueur extraordinaire, qui auraient escaladé le ciel afin de combattre les dieux et ainsi provoquer leur colère. Ils furent alors punis par Zeus, qui les sépara chacun en deux moitiés. Or quand les corps furent scindés, chacune des moitiés regrettant sa partie perdue, allait à elle pour l'embrasser, l'enlacer avec le désir de se réunifier. Ce mythe serait fondateur du phénomène amoureux qui tendrait vers la recomposition antique de la nature humaine en fusionnant deux êtres en un seul. 


La recherche de l'âme soeur

Toutefois, dans certains textes, l'androgynie se présente sous une forme allégorique décrivant une perfection spirituelle induite par une sorte de gémellité spirituelle primordiale. Pour la littérature romantique, l'androgynie fascine et occupe une place de choix. L'androgyne y est représenté comme un être supérieur, tel Séraphîta, personnage du roman du même nom de Balzac, aimé en tant qu'homme par Minna et en tant que femme par Wilfred. Séraphîta qui fait preuve d'une érudition et de capacités intellectuelles hors normes, bien que n'étant pas un ange descendu sur Terre, est toutefois un "humain parfait", parce qu'un "être total". En revanche, dans les romans et nouvelles issus du mouvement décadentiste de la fin du XIXème siècle, la figure de l'androgyne subit une "dégradation du symbole", et devient un hermaphrodite morbide voire satanique.

Au XXIème siècle, le terme androgyne définit une personne ayant des caractéristiques physiques ne permettant pas de déterminer spontanément à quel sexe elle appartient. La plupart du temps, l'androgyne se ressent et se définit lui-même comme étant une personne qui ne parvient pas à trouver sa place dans le schéma binaire masculin/féminin de notre société contemporaine. En dépit des nombreux amalgames s'y rapportant, s'agissant notamment de l'orientation sexuelle, l'androgynie n'a rien à voir ni avec l'homosexualité, ni avec la transidentité. L'androgyne n'est pas non plus un hermaphrodite, c'est-à-dire un être ayant développé à la fois des organes génitaux masculins et féminins. Être androgyne, c'est bénéficier à la fois de caractéristiques masculines et féminines.

Nous devons donc différencier l'androgynie - qui est une construction psychique - d'une sexuation "neutraliste", d'une sexualité au sens des organes sexuels ou encore de l'hermaphrodisme. Généralement, la personne androgyne qui a un corps biologique habituel, mâle ou femelle, se construit une identité sexuée plus complexe que celle qui découlerait naturellement de son enveloppe corporelle.


Saint-Jean Baptiste (Léonard de Vinci)

La question qu'impose le particularisme de l'androgynie est de savoir si l'on peut vivre, s'approprier, bénéficier en tant qu'homme ou femme, de la totalité du potentiel comportemental lié aux deux principes, féminin et masculin. Question d'autant plus complexe que l'androgynie est méconnue comme position psychique. Seuls quelques ethnologues l'ont abordée en tant que coutume singulière de certaines ethnies amérindiennes où les berdaches (ou bardaches) sont des êtres possédant deux esprits, masculin et féminin (agokwa, "comme une femme", en Ojibwé). 

Aujourd'hui dans un Occident où la société accuse un certain flottement déconstructiviste, les androgynes sont plus apparents, plus assumés. Afin de reconnaître cette réalité,  il semble que nous devions prendre un certain recul quant aux conceptions normatives binaires homme/femme en lesquelles ne peuvent s'identifier pleinement les personnes androgynes. 

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