Les sex-robots ne sont pas une révolution

Les sex-robots ne sont pas une révolution mais une simple fantaisie masturbatoire.
A en croire certains, nous serions au beau milieu d’une révolution sexuelle qui tendrait à donner à la femme idéale l’image d’un robot. Le mot révolution semble sinistre, mais c’est celui qui est employé par les concepteurs de ces machines sexuelles capables, dit-on, d’exprimer leurs propres désirs. Il a été suggéré que les sex-robots pourraient venir en aide à tous ceux qui ne sont pas en mesure d’avoir des relations intimes : personnes souffrant de handicap, personnes atteintes de démence par exemple. Belle et noble idée que celle de reconnaître à tout un chacun un droit à la sexualité. Cependant, la réalité est beaucoup plus prosaïque. Les concepteurs de ces "machines de l’amour" n’ont qu’un objectif en tête, faire du business en créant des femmes "prêtes à l’emploi", obéissant au doigt et à l’œil de leur acquéreur.
Les plus sophistiquées de ces machines peuvent parler et être programmées à partir d’un smartphone ou d’une tablette.
Leurs orifices sont conçus pour procurer des sensations au plus proche de la réalité. Il est possible de les activer sur divers modes, en mode "frigide", notamment si le client aime les relations forcées. N’est-ce pas le paradis ? Faire du sexe avec un robot aurait de nombreux avantages dont celui d’offrir une complète liberté d’expression fantasmatique. Le cybersexe ouvrirait un champ des possibles infini... en théorie.
Dans la pratique, ces artefacts ne sont que des masturbateurs sophistiqués intégrés dans des corps artificiels à la peau douce et au sexe parfaitement imité, rien de plus. Pourtant, l'on prédit à ces gentilles et dociles poupées un avenir radieux. Un bordel barcelonais, ouvert en février 2017, a fait tapiner quatre sex-robots "parfaitement désinfectés avec un bactéricide avant et après usage" (sic!). It’s so sexy ! Victime de son succès, l’établissement qui se vantait d’être le premier bordel à proposer des sex-dolls, a dû fermer ses portes, le bailleur ayant appris par voie de presse la nature particulière de l’activité de ses locataires.
Au-delà de l’anecdote barcelonaise, cette "évolution" induit bien des interrogations.
Certains se demandent si ces poupées pourraient endiguer la prostitution classique, la prostitution infantile, la pédophilie, le viol et donc épargner des vies humaines. D’autres pensent que ces robots ultra-perfectionnés seront, dans un avenir proche, non seulement dotés d’intelligence mais aussi de conscience. On se demandent alors si, comme tout être humain, ils ne devront pas avoir des droits.
Nous sommes entrés dans un monde technologique où les robots vont prendre de plus en plus de place, devenir de plus en plus performants, c’est une certitude. D’ici 20 ans, 40% des emplois seront assurés par ces machines intelligentes. La Corée du sud souhaite qu’à l’horizon 2020, tous les foyers soient équipés de robots. Au Japon, les relations sexuelles sont de plus en plus intimement liées à la technologie et de moins en moins à l’humain. Nous sommes déjà si fusionnels avec la technologie que faire du sexe avec un robot semble aller de soi. Pour reprendre Donna Haraway, le XXème siècle a rendu floue la frontière entre le naturel et l’artificiel, le XXIème siècle tendra à abolir la notion de physicalité. Tout cela nous conduira à repenser le concept de nature humaine.
Sur quelques sites comme Breitbart ou Reddit, les objections concernant l'objetisation des femmes sont tournées en dérision par des hommes formatés par la pornographie, les jeux-vidéos, mais surtout hermétiques aux discours sur le consentement. Pour eux, l’opportunité de pouvoir se passer des femmes de chair et d’os doit être célébrée comme une victoire sur le féminisme. Victoire de l’anti-féminisme peut-être, défaite de l’humain sûrement.
Il y a cependant une porte que même les "libertaires" endurcis ont du mal à franchir, celle qui s'ouvre sur un monde où les poupées sexuelles ressemblent à des enfants.
Car en matière de sexualité, la réalité va plus vite que la fiction, ces sex-robots infantiles sont déjà commercialisés au Japon. L’entreprise nippone Trottla en fabrique depuis une décennie, sans que personne n’y trouve à redire, ni au fait que son PDG, Shin Takagi, se déclare ouvertement pédophile. Pour défendre la production et la vente des sex-dolls prépubères, l’argument avancé par Takagi et une poignée d’experts repose sur l’idée douteuse que ces dernières pourraient éviter des passages à l’acte. Pour les protecteurs de l’enfance, l’usage de ces poupées sexuelles ne peut induire qu’une désensibilisation et une normalisation de la paraphilie pédophile, des conséquences bien connues de la consommation d’images pédopornographiques. Si le Royaume Uni en interdit l’importation et qu’au Canada, un homme trouvé en possession d’une sex-doll infantile a été condamné pour recel de matériel pédopornographique, le vide juridique qui entoure leur commerce est un espace de liberté où tout demeure permis et les fabricants savent en profiter pleinement.
Si nous décidons qu’il n’est pas convenable de se masturber avec un sex-robot aux allures d’enfant, pourquoi le serait-ce avec une réplique de femme adulte ? Ne doit-on pas se poser des questions sur le privilège accordé au désir masculin ? Doit-on accepter l’idée que répondre aux besoins sexuels des hommes est inévitable car très lucratif ? Cette "évolution" technologique, motivée par des fantasmes masturbatoires, ne va pas dans le bons sens et in fine, on peut se poser la question : qu’est-ce qui ne va pas avec les femmes ?
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