Sphère sociétale

Utérus artificiel : vers un monde transhumaniste

Utérus artificiel : vers un monde transhumaniste

Utérus artificiel : vers un monde transhumaniste

Vers une société transhumaniste et masculiniste !

Sur fond de féminisme dévoyé, les fervents adeptes de la biotechnologie avancent que libérées des contraintes de la grossesse, les femmes pourront enfin s’émanciper pleinement. L’idée n’est pas nouvelle, en 1970, Shulamith Firestone, féministe radicale canadienne, soutenait que la seule façon de parvenir à une égalité réelle entre homme et femme passerait par "l'abolition des différences sexuelles elles-mêmes" et la désintégration du concept de maternité. On reste dubitatif quant à cette vision sociétale qui tend à confondre égalité et uniformisation, et sauf à comprendre la maternité comme une maladie, une tare ou un fardeau on se refusera à la voir comme une entrave à l’émancipation. Nombre de femmes ont d’ailleurs expérimenté avec succès le cumul d’une ou plusieurs grossesses, la gestion de leur carrière professionnelle et leur épanouissement personnel. En fait nous devons nous demander qui de l’utérus artificiel ou de l’acceptation de la valeur imprescriptible de la maternité serait l’option la plus profitable à la condition féminine. 

Gagner la bataille de l’égalité en s’affranchissant de la dépendance aux hommes, de la dépendance morale aux préjugés, devrait être la seule raison d’être de l’émancipation. Mais en présumant que la condition biologique de la femme, sa fonction de gestation, est le principale obstacle à celle-ci, on laisse entendre que pour s'émanciper les femmes devraient avant tout se départir de ce qui les constitue. En filigrane de cette argumentation perverse apparait qu'une fois encore l'on tente de rendre la gent féminine responsable des situations délétères qu'elle est amenée à vivre (remarquons que ce type d'allégation sert aussi à justifier nombres d'agressions sexuelles.) 

Renoncer à la gestation, sous prétexte d'émancipation, est la pire concession que les femmes pourraient faire à la disparition du féminin souhaitée par les plus radicaux des masculinistes. Selon leurs théories les sociétés humaines sont gynocentrées depuis la nuit des temps et ce du fait du rôle primordial que jouent les femmes dans la perpétuation de l’espèce. Ils voient donc dans l'utérus artificiel et l'ectogénèse l'opportunité de réduire ce rôle à néant et d'ouvrir la voie à l'avènement de sociétés où l'utilité des femmes se résumerait au don d'ovocytes et à la satisfaction sexuelle des mâles. Reconnaissons que dans cette perspective l'utérus artificiel est nettement moins porteur de progrès que dans celle de la survie des grands prématurés. 



"Tout ce que peut faire une femme, la technologie le fait en mieux"

La maternité, l'expérience humaine ultime.

Toutes les femmes ont leur opinion sur la maternité. Certaines l’appréhendent voire la redoutent quand d’autres la célèbrent comme la plus belle et intense aventure que la vie puisse offrir à un être humain. Mais quoi qu'il en soit des difficultés ou des joies qui lui sont associées, elle demeure un évènement à nul autre comparable et au temps de l'accouchement quand la souffrance, l'extase, la vie, la mort entrelacées forment un tout indivisible, l'expérience humaine ultime. 

L'avènement de l'utérus artificiel s'inscrit dans un continuum de pensée du corps médical occidental persuadé de pouvoir palier les supposées carences des processus naturels et particulièrement ceux de la maternité. Comme le fait remarquer Nicole Ferry, sage femme et auteure, dans un article paru en 2008, "Devenir mère, une formidable rencontre", la surmédicalisation de l'accouchement est une aberration, une erreur à la limite de l'absurdité :" Avec les déclenchements et le contrôle du déroulement des accouchements, de très nombreuses naissances sont [...] accélérées par la rupture prématurée de la poche des eaux et la pose d'ocytocique [...] La maman reçoit des antalgiques ou la péridurale et dès les premières contractions utérines elle est allongée. Elle regardera le monitoring pour suivre la progression du travail [...] De nombreuses femmes ne ressentent pas elles-mêmes le besoin de pousser au moment de l'expulsion. C'est le soignant [...] qui invite la mère à pousser. Cette phase est pourtant essentielle dans le processus de l'accouchement. L'expulsion n'est pas un acte volontaire, c'est un phénomène réflexe : l'appui sur le périnée donne à la mère l'envie irrépressible de pousser pour faire naître son enfant. Ce n'est pas son cerveau conscient, ni le savoir du soignant qui doivent indiquer à la mère quand et comment elle doit pousser."  Que les aides à l'accouchement soient présentées comme un "mieux vivre l'évènement" peine à cacher la réalité de sa taylorisation, réduction des coûts oblige. Dans cette logique économique, le déploiement de l'utérus artificiel à grande échelle ne déplairait sans doute pas aux zélateurs de la rationalisation et le danger de voir advenir pareil scénario n'est certainement pas à exclure.


L'utérus artificiel d'Emanuel M.Grennberg.

Science sans conscience.

Avec, dans la décennie à venir, la probable mise au point définitive de l’utérus artificiel, l’ectogénèse n’a plus le caractère d’un roman de science-fiction. Seules aujourd’hui les limites imposées par la morale et l’éthique scientifique semblent en mesure de contrecarrer ce que les transhumanistes pensent déjà comme une véritable révolution sociétale. Mais l’appétit immodéré des scientifiques pour l’expérimentation leur a souvent fait oublier les questions d’éthique ou trouver les bons arguments pour convaincre les politiques de lever les barrières juridiques.

En novembre 2018, le généticien chinois, He Jiankui, a révélé avoir, dans le cadre d'une FIV, tenté de créer une mutation du génome de deux embryons afin de leur assurer une immunité naturelle contre le virus du sida. Si de toute évidence l’expérience a échoué, elle a ébranlé tous les principes éthiques établis, ouvrant la porte à une extension de leurs limites. Jusqu’au mois de mars dernier, il était interdit de transplanter des embryons hybrides dans un utérus de substitution (l’embryon hybride est un embryon animal dans lequel des cellules humaines ont été transplantées). Le ministère japonais des Sciences et de l’Éducation a finalement autorisé cette pratique controversée en juillet. L’éthique est une frontière qui ne cesse de se redéfinir au gré des avancées scientifiques, plus généralement comprise comme un frein au progrès qu'une protection contre ses dérives.

L’utilisation d’un utérus artificiel pour sauver des prématurés extrêmes d’une mort certaine marque certainement un progrès dans la gestion des grossesses à risque. Il n'est donc pas, dans ce domaine, nécessité de s'y opposer. Pour le reste nous espérons qu'une législation d'encadrement puisse voir le jour afin de contrarier toutes velléités de réaliser des ectogénèses quelles qu'en soient les justifications.

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